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ANECDOTES DE LA PÉRIODE RÉVOLUTIONNAIRE : 


Les petites histoires qui ont fait  l'Histoire. A partir de la Révolution..........

Les histoires que vous allez découvrir  sont le fruit des recherches que je mène  depuis prés de cinq ans dans les Archives municipales de Barsac,
  à partir de 1789,
période révolutionnaire jusqu'aux années 1900.  Au fil des découvertes,  je vous  délivre ces "  Histoires "  telles que je les perçois.
Je convie tous mes collègues ou passionnés de recherches historiques du canton de nous faire parvenir  leurs découvertes et histoires
 afin d'en faire profiter tous les amateurs.
Le plaisir de l'historien local n'est il pas d'allier les recherches, les découvertes et de les partager ?

Communes concernées Titre de l'article Auteur et lien mail
BARSAC - CÉRONS
ILLATS
BARSAC, PREIGNAC, ILLATS & BUDOS
PREIGNAC
Septembre, Octobre 1791  Règlements de comptes entre Céronnnais et Barsacais
20 Ventôse de l'an III (12 Mars 1795) Incendie au village.
1795-1798  - Les cloches au ban des " condamnées au silence ".
Le Bac de Preignac  .
Michel LAVILLE   Mail
Michel LAVILLE
Michel LAVILLE
Michel LAVILLE


BARSAC - CÉRONS
Septembre, Octobre 1791
Règlements de comptes entre Céronnnais et Barsacais
Cheverry, Médeville et Lanneluc officiers municipaux de Cérons offusqués par la rixe qui s'est déroulée le 18 Septembre vers 5 heures du soir chez Le Brin, aubergiste à Cérons, s'en remettent aux autorités municipales de Barsac pour essayer de ramener les jeunes à la raison.
Une trentaine de jeunes de Barsac attroupés devant l'auberge de Le Brin, caillassent le bâtiment, brisent les vitres et s'en prennent aux clients, avant de rebrousser chemin. Cette retraite n'est que provisoire, le regroupement des jeunes se fait sur le Grand Chemin, et là, le valet de Capdeville commence à maltraiter un jeune céronnais. Le sieur Roborel, procureur de la commune de Cérons , alerté, se rend sur les lieux et essaie de calmer les esprits et de ramener tout ce petit monde à la raison .

Les esprits s'échauffent :
            N'arrivant pas à maitriser la situation, il demande main-forte. Les renforts arrivent, les Barsacais battent en retraite mais " quand ils furent à 25 pas ou environ, ils se mirent à jeter des pierres contre des femmes et des enfants qui se trouvaient sur le chemin,   alors des jeunes gens de la paroisse voulurent leur courir après pour les renvoyer. " les pierres continuent de pleuvoir jusqu'à ce que le sieur Cheverry, officier municipal, et le sieur Roborel procureur de la commune soient obligés de courir vers le village de  Jeanbouy (Jean Bouet), et ordonnent aux céronnais de se retirer , ce qu'ils firent.
    Les Barsacais rebroussent chemin en continuant à lancer des pierres aux citoyens Cheverry et Roborel en leur criant que : "  s'ils allaient à Barsac, ils voulaient les pendre ou les couper en morceaux. " Dans leur rapport à la municipalité de Barsac, ils ne mettent  pas en cause tous les jeunes, mais désignent comme meneurs, le valet de Capdeville, le fils aîné de Poussai, et le plus jeune des fils de Barthélémy Bayle.

Réaction des autorités municipales de Barsac.
Joseph Vincent Bireton maire de Barsac, après avoir réuni son conseil décide de placarder une proclamation pour essayer d'apaiser les esprits des deux camps et ramener Barsacais et Céronnais à  des relations plus pacifiques, voire amicales.
    " Il est facile de juger que la cause de cette haine est due à la frivolité, et à la vivacité de l'âge des jeunes citoyens dont la légèreté, l'inconstance et la force du corps  est pour eux une passion  de se battre, tandis que la paix, l'union et la tranquillité devraient être parmi eux. "
    " Les habitants d'ici et ceux de Cérons ne peuvent aller dans leur paroisse respective sans s'exposer à être battus outrageusement......, chacun d'eux a raison de se plaindre les uns des autres, et lorsqu'il a été question d'éclaircir les faits, il a été impossible de découvrir les vrais agresseurs. "
     Les officiers municipaux des deux communes, trouvant que " la querelle respective des habitants, n'est fondé que sur des raisons chimériques, invitent les habitants de Barsac et de Cérons à oublier le passé, ne penser qu'au présent, et  fraterniser avec ceux de Cérons comme par le passé, et vivre d'une liaison amicale. "
    Par contre s'ils n'arrivent pas à cesser ces querelles, " si des désordres ou excès persistent, celui ou ceux qui en seront le moteur seront punis par la Municipalité du lieu, mais seront également déférés devant l'Accusateur Public et poursuivis pour être jugés suivant la rigueur des lois. "
C'est ce que l'on appelait les " querelles de clochers ".
 Michel Laville        (Archives municipales de Barsac)

ILLATS

20 Ventôse de l'an III (12 Mars 1795)
Incendie au village.
Le citoyen Avezou agent municipal de la commune d'Illats est consterné que les délits, " qui nuisent au bien public, et les violations de propriétés dont on ne peut découvrir les auteurs ni les complices. " restent impunis.
Cette réflexion lui vient après une catastrophe qui aurait très bien pu tourner au drame, car il y aurait pu avoir des victimes : l'incendie  qui a failli ravager le village.
Le 20 Ventôse, dans la soirée aux environs de 9 ou 10 heures, un feu terrible illumine la contrée au Nord-Ouest du Bourg d'Illats à environ 400 ou 500 pieds.
Le vent venait du Nord, les lueurs embrasaient le ciel, une épaisse fumée obscurcissait l'horizon ; on accourait de toutes parts sur les lieux, et malgré les bonnes volontés le feu progressait et avalait tout sur son passage.
On s'aperçut alors, que ce feu n'était pas accidentel, mais volontairement allumé " exprès par un quidam ou plusieurs ".   Des vieux linges, quelques morceaux d'étoffes qui avaient autrefois servis à faire des épouvantails à oiseaux, une allumette de soufre " dont on se sert pour tirer le vin ",une pièce de landes déserte à ces heures ci , et voilà le brasier qui s'empare peu à peu des broussailles , des bruyères , qui s'amplifie  et dévore tout sur son passage. Le lopin de terre d'où est parti ce sinistre appartenait au Citoyen Taffard,  vengeance ou simple  coïncidence ? On ne le saura pas.
 Le feu progresse, ravage les terrains qu'il traverse, consume au passage plus de 100 charrettes de bruyère, " il détruit même les bois de la Nation qui étaient pourtant distant de 800 à 900 pas ". Sans cesse menaçantes les flammes avancent et s'approchent dangereusement du Bourg. Les habitants se mobilisent pour lutter contre les flammes arrivées aux portes du village. Ils réussirent avec force, courage et conviction à protéger le Bourg de ce feu "  qui eut détruit des pays immenses ". Une nuit de terreur qui a marqué les villageois, tant le désastre était immense. Au levé du jour un paysage de désolation, des terres calcinées, des squelettes d'arbres noirs qui se dessinaient sur le ciel, une campagne cauchemardesque à qui il faudra des années pour se remettre de cet incendie, mais la nature reprendra ses droits et les souvenirs s'estomperont au fil des générations.
Le citoyen Avezou, impuissant devant une telle situation  demandera à l'administration  " que soient prises des mesures urgentes  pour prévenir de pareils délits,   intimider les méchants et arrêter le mal. "  Il sera entendu par ses collègues, mais la tâche sera difficile pour lutter contre ces citoyens malveillants qui agissent dans l'ombre.
Michel Laville (Archives Municipales de Barsac)
BARSAC & PREIGNAC
Ventôse an VI (Février 1798) 
 Exclusions des nobles et anoblis - Guillotinés
 Un rappel de l'administration du Département de la Gironde  à l'administration du Canton concerne " la chasse " aux nobles et anoblis, qu'ils assimilent aux étrangers,    notamment pour l'exercice des droits de citoyen. Déjà au mois de  septembre les parents ou alliés d'émigrés étaient assimilés, d'après   la loi du 3 Brumaire de l'an IV à des émigrés, et spoliés comme tels "  ôte aux ennemis de la République, l'un des points d'appui les plus puissants dont ils firent usage aux dernières élections, pour envahir les  magistratures Républicaines, afin d'y stipuler l'intérêt des  rois, et de servir avec plus de succès leur cause liberticide. Sachons profiter de l'exemple du passé..... " " Pour paralyser tous ces ressorts de l'intrigue et de la malveillance, il nous parait important de faire connaître d'avance tous ceux que les Lois ont frappés d'incapacité. "
L'administration demande donc aux communes d'établir deux listes.  La première de tous les nobles et anoblis du Canton en ayant soin de ne pas y comprendre :
1°) ceux d'entre eux qui auraient été membres des diverses Assemblées nationales, à moins qu'ils n'aient protesté  contre le Décret d'abolition de la Noblesse.
2°) les Militaires en activité de service. Nous ne vous parlons, ni des Membres du Directoire, ni des Ministres, parce qu'aucun d'eux n'a son domicile dans notre territoire. Nous ne vous parlons pas, non plus, de ceux qui  pourraient prétendre à des exceptions particulières (article II de la Loi du 9 Frimaire), aucune loi n'ayant encore déterminé le mode de les établir. "
Afin qu'il n'y ai aucune équivoque possible, sachant que de simples roturiers,  avaient pu  être anobli, et " afin qu'aucun d'eux n'échappent a vos recherches. " les deux sortes de nobles telles que défini par l'administration du département sont :
1°)  Ceux qui l'étaient par leur naissance, et dont les origines étaient plus ou moins anciennes.
2°) Ceux qui l'étaient devenus, soit par des lettres d'anoblissement, soient par des charges  qu'ils avaient occupées ou par celles de leur père. "  Les anciens nobles sont faciles à distinguer, et vous n'avez pas besoin, à cet égard, d'aucun détail particulier. "

Eclaircissements et précisions sur la seconde classe : Le Roi avait des largesses infinies pour ses amis et savait être reconnaissant pour ses " serviteurs ".
Vous observerez :
       1°) que  l'office de secrétaire du ci-devant roi au premier degré, après 20 ans d'exercice, et même avant ce temps, si le titulaire décédait revêtu du dit office et en exercice.     2°) que les Trésoriers de France, les présidents et conseillers au ci-devant Parlement, et des autres cours que l'on appelait souveraines, et les Greffiers en chef, bénéficiaient, jouissaient de la Noblesse personnelle, et s'ils n'étaient pas noble d'extraction, ils ne la transmettaient qu'à la seconde génération : il fallait alors que le premier titulaire exerçât 20 ans ou mourut en exercice, ainsi que le second titulaire.
 3°) que la noblesse militaire était transmissible de la même manière. Un roturier, par exemple, parvenu au  grade de colonel, jouissait de la noblesse personnelle, et si son fils, parvenait au même grade, alors il la transmettait à ses enfants. La Croix de Saint Louis procurait les mêmes avantages, et cette distinction avait les mêmes effets. "
Il y avait également les places d'Echevins à Paris et à Lyon, celles de Capitoul à Toulouse, et celles de Jurats à Bordeaux et dans d'autres villes, qui permettaient d'être anobli. Le roi pouvait accorder spontanément des lettres d'anoblissement à ceux qui se distinguaient dans la profession des armes, dans la robe, dans les arts, dans les sciences ou dans le commerce. Et il est précisé que " Dans la seconde liste vous comprendrez tous les pères, fils et petits-fils, frères et beaux-frères, les alliés, ainsi que les oncles et neveux des individus compris dans la liste des émigrés et non définitivement rayés. " Toutes ces recommandations sont signées de l'ensemble de l'administration départementale de la Gironde : Duplantier président, Partarrieu-Lafosse, Richard de Meyere, Guibbaud et Clémenceau, Pagès étant le secrétaire.

Une réponse très courte :
 L'administration Cantonale de Barsac, dont   faisaient parties Illats et Preignac, répondit en bas de page : " Valens de Preignac dont le père est anobli dans les Jurats de Bordeaux, Vendière * père, également de Preignac, Chevalier de Saint Louis, se disant noble d'extraction, et sur Barsac Roland Dupont (souvent orthographié Du Pont), noble d'extraction et Védrines ci-devant Chevalier de Saint Louis.

*Georges Joseph Vendière, ancien capitaine du régiment d'Infanterie du Soissonnais âgé de 71 ans en 1797, habitant de Preignac, est né à Morlais en Barois dans la Meuse. Il a du se justifier, étant considéré comme émigré, en présentant le 8 Juin 1797 ses quittances d'impositions mobilières de 1791 et 1792 ainsi que sa contribution patriotique. Il affirme devant témoins que depuis le 1 er Janvier 1790  et la suppression de son emploi, il n'a joui d'aucune autre pension que de la somme de 300 livres, ni d'aucun traitement d'activité. Cette attestation a été faite en présence de  Etienne Leydet boucher et Jean Verdier, charpentier de Haute futaille tous deux de Preignac. Le signalement que nous en avons : Cheveux blancs, taille 5 pieds 3 pouces, le front grand, les yeux saillants, le nez à la romaine, la bouche moyenne, le menton ordinaire, il est sourd.

  Dés les premiers jours de la chasse aux antirévolutionnaires, royalistes, nobles, émigrés et autres cibles, la guillotine a été mise en service.  Quelques Barsacais et Preignacais, nobles ou militaires en ont été victimes. C'est ainsi  que le 24 Frimaire an II (24/12/1793), Claude Henri de Lur Saluces, marquis et maréchal de camp, âgé de 63 ans fut guillotiné pour " crime d'aristocratie ". 
 Le 21 Messidor an II ( 9/07/1794) Jean Baptiste Joseph du Myrat, écuyer et Chevalier de l'ordre de Saint Louis , âgé de 65 ans , et qui avait épousé une antillaise de Saint Domingue, Marie Leforestier, propriétaire de Myrat et de Cantegrit, fut guillotiné à Bordeaux , le lendemain Jean du Myrat son fils aîné âgé de 36 ans , militaire " reconnu coupable d'avoir tenu des propos contre l'unité de la République , une et indivisible. " , et François Joseph du Myrat, son fils cadet, militaire , âgé de 30 ans subirent le même sort.
 Egalement ce même jour le 22 Messidor de l'an II , Gabriel Barthélémy Romain de Filhot, âgé de 52 ans , conseiller au Parlement, éminent magistrat, propriétaire des châteaux Filhot et Coutet a été guillotiné . Motif "  Contre révolutionnaire ".
Louis Larrieste  âgé de 74 ans, ancien officier décoré de la Croix de Saint Louis  a été guillotiné le 9 Messidor de l'an II (27/06/1794) " pour n'avoir pas accepté le Décret de 1793. "
Jean Mercier négociant, âgé de 68 ans, a été exécuté le 17 Pluviôse de l'an II comme contre révolutionnaire, il était accusé " d'avoir fait passer de l'argent à un émigré (dont le nom avait été raturé et surchargé par le commissaire militaire de Bordeaux.)
Auguste Journu âgé de 40 ans, négociant propriétaire du château Nairac fut guillotiné le 17 Ventôse an II (5/02/1794), pour avoir dans une correspondance "  comparé les assignats à des pétards, en conseillant de ne pas les laisser vieillir en portefeuille. "
Jean Baptiste Pierre Jules Dudon  fils âgé de 43 ans, procureur général du Parlement de Bordeaux condamné à mort le 2 Frimaire de l'an II par le commissaire militaire de Bordeaux, convaincu d'être ennemi déclaré des " maratistes " et d'avoir fait en présence de témoins le serment de ne combattre l'ennemi que sur ses terres.
 La République " une et indivisible ", parfois sous des prétextes   fallacieux a fait tomber des têtes .  Les raisons : la chasse aux ennemis de la paix et de la liberté, aux royalistes " sans doute vos administrés ont-ils été effrayés de l'abîme que le Royalisme avait ouvert sous leurs pas. " mais toujours une finalité : séquestration  des biens des  victimes,   ce qui impliquait, parfois malgré eux, les parents ou les amis. Le besoin d'argent pour mettre en place cette République tant attendu et constituer un gouvernement qui se cherche, a entraîné des abus et des crimes qui entachent et maculent de sang cet idéal de liberté que désirait tant le peuple. Le serment que doivent prêter tous ceux qui font allégeance à la République  parle de lui-même : " Je jure haine à la Royauté et à l'anarchie, attachement et fidélité à la République et à la Constitution de l'an III. "
Michel Laville.                                (Archives municipales de Barsac)


BARSAC, PREIGNAC, ILLATS & BUDOS
1795-1798

- Les cloches au ban des " condamnées au silence ".
Tous les signes extérieurs qui se rattachent de prés ou de loin au culte  ou à la royauté doivent être abolis ou détruits. Les églises sont devenues les Temples de la Raison, le culte de l'Etre Suprême remplace celui de Dieu, et c'est dans les églises dépouillées de leurs richesses que se réunit tous les " décadis " l'administration communale pour lire les lois, les décrets, faire ses déclarations et célébrer mariages et baptêmes qui ne sont plus du ressort des prêtres. Dans cette coquille vide, ne subsistent, peut être  provisoirement, que les cloches, qui rythmaient la vie du village. Le 18 Fructidor leur a porté le coup de grâce, en frappant " les  suppôts  de la Royauté ".  " Ces conspirateurs perfides s'étaient imaginés parvenir à leur but en ressuscitant les institutions anciennes inventées pour la plupart par l'ambition et les fraudes du fanatisme. Au premier rang de ces moyens, ces nouveaux missionnaires plaçaient le rappel des cloches ; heureusement on les a condamnées au silence. " Oui, citoyens, on assure que dans plusieurs communes, le vieil usage de sonner les cloches se renouvelle.
Décidé à faire respecter la loi l'administration Départementale de la Gironde, renouvelle son appel avec une plus grande sévérité pour lutter contre toutes sonneries de cloches, qui rappellent un culte que la révolution a voulu abolir.
" Il est des abus, de leur nature, qui ne tombent pas immédiatement sous le sens : un Magistrat chargé de les réprimer, peut alors, avec quelque vraisemblance, prétexter qu'on l'a trompé, qu'on a mis sa surveillance en défaut. Mais la sonnerie des cloches se constate par elle-même, et il est impossible qu'une administration puisse ignorer un fait de cette nature. "
 Ce rappel aux fonctionnaires communaux , qui faisaient la sourde oreille,est clair : il faut punir les contrevenants, la loi du 3 Ventôse de l'an III et celle du 22 Germinal de l'an IV sont catégoriques : le son des cloches est interdit sous "  peines correctionnelles ", et entre autres dispositions l'arrêté du 26 Pluviôse an IV stipule : "  Toutes les fois que les cloches auront été sonnées dans une commune, l'administration municipale du Canton en ordonnera le brisement et en rendra compte à l'administration départementale ; les cloches ainsi brisées seront envoyées à la monnaie à Bordeaux. "
Si ces directives ne sont pas appliquées il sera envoyé sur place un Commissaire. Ce fut une aubaine pour frapper monnaies et fabriquer des canons qui manquaient  à l'armée. Toutes les communes, malgré le durcissement des lois, ne se sont pas pliées à ces directives, et chacune a expliqué ces manquements, tout en confirmant leurs vertus Républicaines et leur haine pour les tyrans.
Le 20 pluviôse an III (10/02/1795) la commune de Barsac répond à une missive du   District de Cadillac, qui rappelle ainsi les consignes : " La municipalité composée de sans-culotte, s'est mise à la hauteur de la Révolution et défendit au ci-devant curé ( Prunier) de continuer ses fonctions, la cloche ne sonna plus ni angélus ni offices attribués au culte dicté par le despotisme. " affirmera Martial Barbère procureur de la commune. Ferme pour appliquer la loi , il apportera une nuance : " Néanmoins il fut décidé que la veille des Décades on sonnerait une cloche pour avertir les citoyens de se préparer pour le lendemain......pour entendre la lecture des lois dictées par nos sages législateurs et guidées par la saine philosophie et la raison. "
Le 21 Pluviôse an III (11/02/1795) la commune d'Illats   le citoyen Ducau , agent national ne sera pas en reste et affirmera : " Depuis sa renonciation au soi disant culte catholique les fêtes et dimanches, n'ont point été annoncés au son de la cloche   . " et comme son voisin d'ajouter : "  On a peut être quelque fois sonné, rarement encore l'heure de Midi, mais moins que pour l'Angélus que pour servir de boussole aux vignerons. "
Le 22 Pluviôse de l'an III (12/02/1795) pour la commune de Preignac c'est Becquet  agent national qui lui dénonce au conditionnel ce petit dérapage : "  Si quelquefois les cloches ont sonné depuis la " déprêtrisation " de notre ci-devant curé, c'est l'homme de notre commune qui se permit à Midi seulement de sonner la cloche non à petits coups comme l'Angélus mais à grands branles pour prévenir les viticulteurs éloignés de l'heure à laquelle ils devaient aller prendre leur repas, mais défense lui en a été faite, la cloche ne sonne que pour annoncer les fêtes Décadaires. "
La loi est faite pour être nuancée si l'on en juge par les plaidoyers de chaque commune, et comme chacune d'elle entendait le son des cloches de sa voisine, pourquoi ne sonneraient elles pas les leurs !.
C'est ainsi que le  3 Messidor an III (21 Juin 1795), plusieurs citoyens de la commune de Barsac se sont présentés dans la salle des séances de l'administration, pour obtenir l'autorisation de faire sonner les cloches pour les jours d'enterrements,  et de l'angélus du soir et du matin.     " Nous avons répondu avec le langage de la fraternité qui sans cesse doit unir la personne des magistrats du peuple avec celle de ses administrés, nous leur avons fait lecture de l'arrêté du représentant du peuple Bordas donné à Bordeaux le 16 Nivôse  dernier relatif aux troubles publics et religieux. " C'est ainsi  rédigé, que la commune transmet la demande au District sachant pertinemment que " la loi c'est la loi. ", et qu'aucune dérogation ne sera accordée.
Les citoyens insistent, arguant que les sonneries des cloches des communes voisines semblaient autorisées, puisqu'elles retentissaient jusqu'à Barsac. Le  District de Cadillac  sera catégorique, et ne fera que confirmer la Loi, avec toute la rigueur qu'implique sa violation.

Novembre 1798 : A Preignac le citoyen Fiton administrateur municipal a convoqué les sieurs Laneluc et Sanson domiciliés sur la commune, pour avoir fait sonner les cloches malgré la loi touchant "  l'exercice des cultes ". Il requiers contre les contrevenants qu'il "  soit fait inhibition et défense à tous citoyens et autres ministres du culte dans les communes de l'arrondissement du canton de faire sonner aucune espèce de cloche dont le bruit puisse s'entendre extérieurement de l'enceinte destinée à l'exercice de leur culte, à peine contre les contrevenants d'être poursuivis conformément aux lois. " Cela ne s'invente pas,  il serait donc possible de les faire sonner si le bruit se concentrait dans l'enceinte de l'Eglise ?
Durant cette même séance les ministres du culte catholique des communes de l'arrondissement ont été convoqué afin que le commissaire du Directoire exécutif le citoyen Laborde leur rappelle : " qu'il était instruit qu'il y en avait d'entre eux qui se permettaient, dans l'exercice de leurs fonctions comme ministre du culte de proclamer des mariages et des naissances, actes qui tendaient tous à pervertir l'esprit, et à entretenir ces idées sur le retour à l'Ancien régime, que tous ces actes étaient irréguliers, à toutes sortes de titres, constituant la mauvaise foi des ministres qui se permettaient et les rendaient réfractaires à la Loi qui les avait dépouillé de cette attribution. " Il les a invité à se renfermer dans les bornes de l'exercice de leur ministère, s'ils ne voulaient pas être exposés à des mesures que l'administration Centrale du Département prescrivait dans ce cas.
(Séance de l'administration municipale du canton de Barsac du 7 Novembre 1798 sous la présidence de Seurin Jeantoulet)

Tous les villages furent concernées, c'est ainsi que Jean Dartigolles, éminent historien de Budos nous raconte : " Souvenez vous qu'on leur avait enlevé une de leurs deux cloches en Octobre 1792, mesure qu'ils avaient fort mal vécue. Mais voilà qu'au mois de Ventôse an II (Février 1794), on leur interdit formellement d'utiliser la dernière cloche qui leur reste. Plus de sonneries, plus rien. A la rigueur, ils auraient peut être acceptés de se passer des sonneries de l'Angélus, encore qu'elles fournissaient un repère bien pratique pour rythmer les journées dans un temps ou pratiquement personne n'avait ni montre, ni horloge. Par contre, ce qui leur parut absolument scandaleux, c'est que l'on puisse enterrer leurs morts, sans faire entendre les sonneries traditionnelles en pareilles circonstances. C'est peu dire que cette interdiction fut mal accueillie. Certaines communes tentèrent de passer outre. Mal leur en prit. Leur unique cloche fut déclarée " coupable ", descendue à terre et brisée à coups de masse, au pied du clocher ; Budos échappa à ce désastre et conserva sa cloche, mais n'en retrouvera l'usage que bien des années plus tard. "
Michel Laville  (Archives municipales de Barsac et Texte  Budos de Jean Dartigolles Budos)

PREIGNAC

Le Bac de Preignac 
.
Le bac de Preignac , seul passage entre Langon et Cérons appartenait dés le XVII° siècle  à la famille Darmagnan qui percevait un droit de passage et l'exclusivité de la traversée à cet endroit précis de la Garonne. Puis ce fut la famille De Roland qui l'acquit en même temps qu'un bien en vignes. La suppression des droits féodaux et surtout des privilèges lucratifs à la Révolution, la séquestration  des biens du clergé et des biens des émigrés en fait un bien national. En Janvier 1797 , le Département , invite le citoyen Fiton, agent municipal de Preignac à faire un rapport  sur " les améliorations ou les inconvénients du dit passage, afin que le gouvernement et les citoyens y trouvent leur avantage réciproques d'après des formes de règlements telles que les citoyens ne soient plus à l'avenir, exposés à être vexés ainsi qu'ils l'ont été par le passé. "
  Allusions à toutes  les formes de rackets et de chantages qui se passaient lors des traversées  ou parfois le prix se décidait au milieu du fleuve.
Des tarifs clairement établis :
Le passage était mis en fermage, le bateau était fourni par le fermier qui acquittait seulement un droit annuel. Ce droit reste à déterminer, sachant qu'en 1790 il était de 400 Frs par an. Le prix de passage était pour cela modeste fixé aux environs de 4 à 5 francs par personne. Le tarif    à compter de 1797 sera de :
- Pour une personne ............................................5 centimes
- Quand sans attendre la personne voudra passer de
- suite en affrétant le bateau..................................15 centimes
- Pour un cavalier et son cheval..............................15 centimes
- Pour un bœuf..................................................20 centimes
- Pour un cochon................................................ 5 centimes
- Pour un mouton ............................................... 2 centimes

En Janvier 1799 s'est posé le problème d'un nouveau bail pour le fermage du bac conformément à la lettre du Département du 12 Frimaire de l'an VI relative "  à la propriété des passages et bacs établis sur les rivières et canaux navigables. ". Ont donc été convoqué   deux candidats : les citoyens Pierre Sarday et Bayle, les actuels préposés au bac, et  un troisième candidat vient se greffer  le citoyen Escudey. Pierre Sarday semble écarté à la première réunion. Un évènement qui a une importance primordiale se passe dans le village : Le 25 Nivôse de l'an VII (14 Janvier 1799)  le citoyen Despujols adjoint municipal est nommé commissaire pour procéder aux séquestres des biens de la citoyenne Veuve Roland Torison (propriétaire entre autre du Bac)  et Roques sœurs dont les biens sont situés sur la commune.
Pour contrôler  leurs droits de copropriétés  concernant les bateaux et les biens indivis de la République les deux candidats sont convoqués devant l'administration municipale du canton sous la présidence de Seurin Jeantoulet président (Barsac), Ducasse et Lacoste administrateurs, Laborde commissaire du Directoire exécutif et en présence de Boyer, receveur de l'enregistrement.
Estimation des bateaux :
 Le citoyen Escudey déclare posséder un bateau qu'il a acquit de la citoyenne Veuve Roland Torison,  ex propriétaire du passage, et justifie son titre. Il déclare en outre être possesseur d'un second bateau qu'il a fait construire à ses frais il y a deux ans, ce qui est reconnu véritable par l'administration.
Le citoyen Bayle déclare qu'il possède un bateau qu'il emploie au dit passage et qu'il a fait construire, à ses frais courant de l'an V .
Jugeant que le bateau existant qui assure la traversée est suffisant, ils retiennent le citoyen Escudey , et procèdent aux estimations et expertises des embarcations.
L'expert nommé pour la Nation est Antoine Dubois charpentier de bateaux, habitant de Bourdelles et maintenant à Cadillac et pour le citoyen Escudey , Marquet charpentier de bateaux , habitant de Saint Maixant
 L'estimation du bateau du citoyen Escudey semble convenir, et "  estimons que le prix de ferme actuel du passage de Preignac est de  300 francs. " alors qu'il était de 400 frs en 1790 quand il appartenait à la famille de Roland.  A compter du 27 Pluviôse le nouveau passeur sera le citoyen Escudey.
Ceci est un petit épisode de la vie du bac de Preignac, qui cinquante ans plus tard aura un concurrent éphémère : le bac de Barsac qui partait de Sarraute depuis la propriété du Vicomte de Bastard  vers le lieu dit de Violle  à Loupiac, dans les années 1850  mais qui ne dura pas longtemps, l'accessibilité étant très difficile.

Michel Laville                                             (Archives Municipales de Barsac)



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